Antoine Sfeir

Nous avons appris la disparition d'Antoine SFEIR, décédé le 1er octobre 2018 à l'âge de 70 ans. 

Ses obsèques seront célébrées en la cathédrale Notre-Dame du Liban, 17 rue d'Ulm (Paris 5e)  le vendredi 5 octobre à 13 h.

Né à Beyrouth en 1948, Antoine Sfeir a fait ses début de journaliste au quotidien francophone l’Orient le Jour. où il couvre les relations internationales. Il y est correspondant pour la Croix. Lorsqu’éclate la guerre civile au Liban, il est enlevé par un commando du FPLP (Front patriotique de libération de la Palestine), torturé, victime d’un simulacre d’exécution. Trois mois plus tard, en septembre 1976, il arrive en France et intègre le groupe Bayard Presse où il sera successivement journaliste à la Croix et au Pèlerin. Il réintègre l’entreprise après la courte parenthèse du quotidien J’Informe créé par Joseph Fontanet en 1977. C’est en 1985 qu’il fonde les Cahiers de l’Orient qui assoient sa notoriété de spécialiste du monde arabo-musulman.

Il est l’auteur d’une vingtaine d’ouvrages dont plusieurs publiés chez Bayard. (*)

Antoine Sfeir 2

En 1988, Antoine (à gauche sur la photo) avec une partie de l'équipe du Pèlerin


Hervé Schaefer, chef du service actualité au Pèlerin dans les années 70, nous parle d'Antoine : 

Décédé le 1er octobre 2018 des « suites d'une longue maladie », il était né à Beyrouth, au Liban, en 1948. Antoine Sfeir appartenait à l'une de ces grandes familles qui ont longtemps dominé la vie politique de ce pays ; son oncle le cardinal Nasrallah Boutros Sfeir fut le patriarche de l'Église maronite, nommé à cette dignité par Jean-Paul II.

Antoine était journaliste au grand quotidien francophone de Beyrouth, L'Orient-Le Jour et était correspondant de La Croix et du Pèlerin, au Proche-Orient. En pleine guerre civile qui ravage le pays pendant près de vingt ans, il est enlevé en 1976 par des miliciens palestiniens que l'on appelait alors les « palestino-progressistes », torturé et finalement relâché après un simulacre d'exécution.

Impossible de rester alors au Liban et, comme des dizaines de milliers de ses compatriotes, il est contraint de s'exiler. En France, bien sûr.

Pour nous à Bayard-Presse, c'était un devoir de lui offrir un emploi, ce que fit le Pèlerin. Chef du service Actualité il me revenait de l'accueillir... et de découvrir ce personnage.

Il arrivait du Liban avec des habitudes qui n'étaient pas les nôtres. Ainsi il m'annonça qu'il faisait venir son « boy », un homme qui vint à la rédaction et s'agenouilla devant lui en lui baisant la main. Impossible à Antoine de comprendre que les lois sociales ne permettaient pas – même s'il le payait – d'employer un « boy ».

Lorsqu'il ne souhaitait pas écrire un article, il essayait de le sous-traiter en agitant des pièces dans sa poche.

Il avait un culot incroyable. Nous avions rendez-vous à Mons, en Belgique, pour rencontrer le général américain commandant en chef des forces de l'Otan. Il nous fit passer la barrière sans encombre et au bout de quelques minutes s'entretenait en anglais, d'égal à égal avec le général. Sans que je puisse placer un mot, quoique pratiquant assez bien, moi-même, la langue de Shakespeare.

C'était un homme remarquable et, grand seigneur, il invita toute la rédaction dans un restaurant libanais non loin du Panthéon.

Avec sa culture, sa maîtrise de trois langues (français, anglais et arabe), il pouvait tout faire. Aussi, cédant à l'appel de sirènes extérieures, il s'en alla rejoindre la rédaction du nouveau quotidien J'informe, lancé par l'ancien ministre centriste Joseph Fontanet. L'expérience ne dura que trois mois et Antoine retrouva Bayard.

Il nous quitta définitivement par la suite pour créer Les cahiers de l'Orient et devenir le spécialiste du monde arabo-musulman sollicité par toutes les radios et télévisions. Sans parler de la vingtaine de livres consacrés à l'islam et au monde arabe...

Adieu, cher Antoine, ce fut un honneur et un plaisir de vivre à tes côtés.

Hervé Schaefer


 

► Odile Douroux avait interviewé Antoine Sfeir dans le numéro 49 de Chapô, cliquez sur cette ligne pour accéder directement à cette interview "Bayard, Antoine Sfeir y revient toujours !". 

 

► Antoine Sfeir, journaliste et spécialiste du monde arabe, est mort (lien vers un article paru le 01/10/2018 dans La Croix) 

 

► Entre Orient et Occident (lien vers un article paru le 02/10/2018 dans La Croix) 

 

► Mort du politologue Antoine Sfeir, spécialiste du monde arabe (lien vers un article paru le 02/10/2018 dans La Croix)

 


 

  (*) 

  • Dieu, Yahweh, Allâh (Bayard Jeunesse 2004) avec Michel Kubler et Katia Mrowjec
  • L’Islam en 50 clés, reprise par Bayard éditions, en 2006, d’un hors série du pèlerin. 
  • Brève histoire de l’Islam à l’usage de tous, (Bayard 2007)
  • Lettre ouverte aux islamistes (Bayard 2008)
  • Chrétiens d’Orient, et s’ils disparaissaient ? (Bayard 2009)
  • Dictionnaire géopolitique de l’Islamisme (Bayard 2009)
  • Dictionnaire du Moyen Orient (Bayard 2011)