Les livres

► Remonter la Marne

► Les récréations d'une grand-mère



Livres 77 1Remonter la Marne

de Jean-Paul Kauffmann, Éditions Équateurs,
315 pages, 7,10 €.
 

«Je me suis fixé une règle – mais c’est plutôt un jeu – d’explorer la Marne jusqu’à sa source, le village de Balesmes», écrit-il. Il le fait à pied, avec un sac à dos qui renferme notamment une boussole, quelques cartes, des jumelles, des livres et des cigares logés dans un étui en cuir. Poids total: 30 kg. «Notre mémoire, écrit Jean-Paul Kauffmann, tourne le dos à la Marne. Pour les Français, c’est avant tout le nom d’une bataille en septembre 1914. Erreur. L’affrontement décisif n’a pas eu lieu à cette époque sur la Marne, mais sur l’Ourcq, le Grand et le Petit Morin, quatre ans plus tard. Cette rivière, si sensible, est censée protéger Paris.»

En principe, la longueur de la rivière Marne est de 525 km, celle de la Seine se limite à 410 km. La Marne, à ses yeux, est bien un fleuve, mais c’est la Seine, arnaqueuse, après leur confluence, qui entre en triomphe dans Paris. Première étape: Gournay-sur-Marne; des lieux qui ont séduit des peintres tels Corot, Cézanne, Picasso ; des lieux de baignade aussi. À Nogent, la ville du petit vin blanc, sous le pont, une sculpture personnifie la Marne, une naïade qui la fait ressembler à une pauvre fille qui, sous un pont, fait de la figuration – ou le tapin.

Chaque étape est marquée par des rencontres, insolites, suspicieuses, des lieux souvent chargés d’histoire, de noms comme Condé-Sainte-Libiaire prononcé par son grand-père George Kauffmann, soldat au 150e régiment d’infanterie; ou à Meaux qui a renoué son lien perdu avec la rivière où près de la tombe de Bossuet surgissent dans sa mémoire des méditations qui l’enchantent. Vitry-le-François, Saint-Dizier…

Dans cette odyssée à travers les paysages d’une France inconnue, l’auteur a découvert des hommes et des femmes indociles qui résistent à la maussaderie et chassent les esprits maléfiques actuels. C’est la France des «conjurateurs».

Michel Cuperly



Livres 77 2Les récréations d'une grand-mère

de Geneviève Laurencin, Éditions Salvador, Collection Famille

188 pages, 19 €

 

Tous les grands-parents se sont dit un jour en entendant les réflexions de leurs petits-enfants: «Il faut que je le note!», tant ces précieux moments, faits de fraîcheur et de logique imparable que seuls les enfants peuvent offrir, méritent de figurer dans la mémoire familiale. Geneviève Laurencin, auteur de livres d’enfants, ne les a pas laissés s’échapper. Elle nous raconte en quatre parties – avec beaucoup d’émotion et d’humour – l’univers de ses quatre petits.

Voici Marion, encore à l’âge de la crèche. Elle découvre les bizarreries des saisons : «T’as vu, Grand-Mère, l’arbre, c’est rigolo. Même avec la pluie, y veux pas s’habiller, mettre ses feuilles. Y va dehors tout nu!»

Puis Clément, à la maternelle, que la place de Dieu titille: «C’est quoi, le métier de Dieu? Il n’a plus rien à faire. Le gros livre qu’est dans ta chambre? – La Bible? – Oui, la Bible, il l’a déjà finie !»

Julien, lui, c’est un grand de l’école primaire. Philosophe, il dissèque l’absurdité : «Rien! Pourquoi on a inventé ce mot-là? Pourquoi il existe, puisqu’il veut dire tout ce qui n’existe pas!»

Thomas, l’ado au collège, pointe les injustices : «Les parents, ils gagnent à tous les coups… Ils sont les chefs, ils commandent et c’est nous les perdants. Nous, les enfants et vous, les grands-parents. Pour notre bien, pour plus tard! D’accord pour les enfants, mais pour vous, le «plus tard» il est déjà là! Tu crois que la famille, elle pense à ça? Que dalle!»

À chacun d’eux, elle consacre un chapitre. On sourit, on rit, on s’émeut… Un beau voyage en enfance, drôle, tendre et poétique qui trouvera un écho dans le cœur de bien des lectrices.

Monique Masson

► Catégorie : Numéro 77